L’huile d’olive Domaine Les Bastidettes

Le meilleur du fruité vert

Les Français et l’huile d’olive… Comme nous avons évolué en un quart de siècle ! Quantitativement d’abord. On nous a incités à en consommer, c’est le moins qu’on puisse dire, cette spécialité méditerranéenne étant à juste titre présentée comme un choix idéal pour la santé, toutes obédiences médicales aujourd’hui confondues. Message reçu. Mais concernant le goût, nos préférences se sont imposées sans discours pour nous guider, à petits pas. Avec un constat chaque année plus évident : le « fruité vert » gagne les faveurs du plus grand nombre.

 

Le fruité

Le fruité est un mot passe-partout qui a donné lieu à de nombreuses confusions. Il y a quelque temps encore était décrite comme fruitée toute huile qui avait du goût, peu importe lequel… À l’inverse, certaines huiles subtiles et délicates échappaient à l’appellation magique, sous prétexte que le « goût d’olive » n’était pas suffisamment marqué. Le langage et le palais des toujours plus nombreux amateurs d’huile d’olive s’étant aujourd’hui affinés, voici ce que nous pouvons en dire : les meilleures huiles ne sont pas forcément les plus fruitées… Et celles qui répondent au qualificatif peuvent se classer en trois catégories : les huiles au fruité noir, au fruité mûr ou au fruité vert.

OLYMPUS DIGITAL CAMERALes huiles au fruité noir sont souvent lourdes, leurs arômes puissants. C’est un peu le goût d’autrefois, qui trouve moins facilement sa place aujourd’hui. Puissance donc, avec une dominante champignon peu appréciable sur les crudités, parfois adaptée en cuisson. Le fruité mûr est plus équilibré. On évoque souvent la paille à son sujet. Quant au fruité vert… Ce fameux fruité vert… Il enivre ! À l’odorat, on lui attribue des notes d’herbe fraîche, d’artichaut, de pomme verte… En bouche, ces caractéristiques se confirment et se joignent à l’arôme d’amande fraîche. Pour parfaire l’analyse sensorielle, on relève fréquemment un trait d’amertume et une touche de piquant, également appelée « ardence » ; celle-là même qui irrite la gorge, mais s’avère indispensable pour que l’ensemble reste vif.

Ce fameux fruité vert est donc aujourd’hui recherché par la majorité. En rayon, notre sélection fait une belle place aux huiles qui répondent à ses critères. Celle que nous vous présentons aujourd’hui en est la meilleure expression.

 

Quand les arbres sont des arbustes

Nous sommes au Domaine des Bastidettes, non loin d’Arles, la plus vaste commune de notre beau pays. Outre cette particularité inattendue, bastidettesveuillez noter qu’Arles se situe bien en France… Pour la première fois depuis longtemps, nous avons donc la joie de vous présenter une huile française, accessible, magnifique. Cette huile est certes le fruit d’un terroir, mais aussi du travail d’un homme, André Meiffre, un fervent amateur, un bel innovateur.

Produire en France, vous l’avez compris, c’est déjà innover, ou presque. Les anciens le faisaient bien sûr. Mais ils ont vite dû se reconvertir sur la vigne ou l’abricot lorsque la main-d’œuvre s’est faite chère et que l’Espagne, L’Italie, La Grèce ou la Tunisie se sont massivement tournées vers la production d’huile d’olive. Les rares producteurs subsistants ont consacré leurs efforts à la production d’huiles de terroir, typées mais hors de prix et donc plutôt confidentielles. Bref, pour espérer produire et vendre correctement une bonne huile aujourd’hui en France, il faudrait une qualité supérieure et un prix correct. Pour y parvenir, André Meiffre n’a pas hésité : il s’est inspiré de ce qui se pratique sur la vigne, ou sur la pomme.

oliviers

Les oliviers en haies fruitières, juste après la taille

Les fruits ne sont plus portés par des arbres, mais par des arbustes, présentés en longues haies fruitières. Ce système présente de nombreux avantages, notamment en coût de main-d’œuvre. Le travail est en effet ainsi facilité toute l’année, et plus encore lors de la récolte. Les olives ne sont plus prélevées en secouant mécaniquement l’arbre, comme presque partout, ni en cueillant à la main, comme à Nyons, mais avec une machine à vendanger.

 

Les arômes

Une telle pratique a chatouillé le métier… On peut pourtant s’interroger : où serait le mal ? Dans le fait d’oser contraindre en culture de rangs un arbre riche d’une si belle symbolique biblique ? Personne ne songerait à le regretter pour la vigne, toute aussi contrainte, toute aussi présente dans les textes. Cette pratique serait-elle un sacrifice sur l’autel du rendement ? Pas du tout, puisque c’est le contraire qui se produit… Si les économies oliviers2en main-d’œuvre sont réelles, les rendements à l’hectare sont largement moindres en haies fruitières. Les arbustes sont savamment taillés, et tout est fait pour qu’on ne s’adonne pas à la facilité de faire « pisser les oliviers », par analogie avec l’expression viticole « faire pisser la vigne ». Est-ce donc la mécanisation qui pose problème ?

 

Les bourgeons. Seules 6 % des futures fleurs donneront des olives

 

Le débat a eu lieu concernant la même vigne, il n’est plus d’actualité aujourd’hui. Non, ce qui gêne certainement, c’est le fait que cette technique oblige bon nombre d’oléiculteurs à se remettre en cause, puisqu’elle donne des résultats exceptionnels au niveau gustatif, essayons de comprendre pourquoi.

Un arbre classique porte jusqu’à 150 kilos d’olives. Un seul système racinaire est mis à contribution pour nourrir les fruits, mais aussi le bois des oliviers, parfois centenaires. En haies fruitières, le système racinaire d’un arbuste travaille pour nourrir plus directement moins de fruits, sans diluer sa sève. Chaque arbuste ne produit que trois kilos d’olives, guère plus. Les rendements sont donc moindres, mais les arômes infiniment plus développés et concentrés, la dégustation le prouve sans équivoque.

 

Les variétés, l’assemblage

bastidettes1André Meiffre a une véritable passion horticole. Se contenter de cultiver une ou deux variétés d’olives l’ennuierait rapidement… Non, ce qui le passionne, c’est d’essayer, d’adapter toutes sortes de variétés à sa région, puis
de déguster, d’évaluer et d’assembler. Assembler les variétés d’olives, comme on assemble les cépages pour le vin. Ainsi vingt-deux variétés sont-elles testées aujourd’hui sur le Domaine Les Bastidettes, une bonne quinzaine étant réellement travaillées. Imaginez-
vous les perspectives aro-matiques qu’autorise une telle richesse ? Vous ne l’imaginez pas, il faudra donc l’éprouver… Un simplet filet d’huile sur une belle tomate suffira à vous convaincre.

 

André Meiffre a conservé de très belles parcelles d’arbres cultivés «à l’ancienne»

 

Acidité

À l’automne, toutes ces variétés d’olives ne sont pas confiées à un moulin extérieur qui les transformerait en huile. Les presser, André Meiffre s’en charge lui-même, très rapidement après la récolte. Cette rapidité de pressage évite à l’olive de s’altérer, ce qui constitue un gage de qualité aisément quantifiable grâce au calcul du fameux « taux d’acidité ». Ce taux d’acidité n’a rien à voir avec l’acidité que peuvent percevoir langue et palais – celle du citron par exemple -, puisqu’il établit le pourcentage d’acides gras dénaturés présents dans une huile. Plus il est bas, mieux c’est. Ainsi une huile Vierge Extra se doit-elle d’avoir un niveau inférieur à 0.8. L’huile du Domaine Les Bastidettes affiche moins de 0.2 à l’embouteillage, on peut difficilement faire mieux.

 

Modeste

Ah, les fameuses médailles distribuées aux différents concours agricoles… Chacun les siennes ? C’est parfois un peu vrai, mais il serait pourtant malvenu de discréditer trop sévèrement une pratique qui anime l’agriculture et le commerce selon une tradition somme toute bien française. Et bastidettes2foin de ragots, parlons sérieusement : le concours général agricole, celui du très réputé Salon de l’Agriculture, met lui en compétition plus de deux mille huiles, parfois trois mille. Les lots sont identifiés avec des codes barre et déposés en plusieurs exemplaires témoins, garants de conformité. Le jury est constitué de spécialistes, parfois journalistes, souvent producteurs, et la dégustation se fait dans les règles de l’art, sans qu’aucune information ne soit donnée sur qui produit quoi.

André Meiffre se montre modeste sur ses performances lors de telles olympiades aromatiques. Ce qu’il a décroché comme trophées est pourtant hallucinant ! En huit ans, pas moins de deux médailles de bronze, trois d’argent et… six d’or. Aux concours régionaux, même succès, sa production étant très fréquemment distinguée par ses pairs. Et puisque nous en sommes à la reconnaissance méritée d’un patient travail, saluons la réputation aujourd’hui internationale du Domaine Les Bastidettes, qui séduit les nombreux amateurs anglais, belges ou allemands. L’ultime récompense ? Elle vient de tomber cette année. Deux journaux étrangers spécialisés, Der Feinsmecker et Mastri Oleari ont classé une des huiles du Domaine parmi les cinquante meilleures au monde.

 

Et moi et moi et moi ?

Et vous ? Spécialiste ou pas, vous ne regretterez pas de vous laisser tenter. Vous apprécierez l’huile Les Bastidettes pour les usages habituels, salades, crudités, ratatouilles, mayonnaises, aïoli, mais aussi avec les œufs aux plats relevés d’un simple soupçon de poivre, ou mieux encore, de cumin. Cette huile vous séduira sur les viandes, et bien sûr avec les poissons en croûte de sel, papillotes, marinades… Plus trivial, elle accompagnera merveilleusement les pâtes chaudes : l’huile est alors particulièrement mise en valeur, la chaleur sublimant des qualités olfactives qui se voient confirmées en bouche sur ce support plutôt neutre ; n’ajoutez rien d’autre qu’une pincée de fleur de sel. Et puis sur les fraises, melons ou framboises… Si, si ! Petit sommet d’origi-nalité convaincante : ne manquez pas la mousse au chocolat façon Clea, dans ce même numéro.

Et lui et lui et lui ?

Le porte-monnaie ? Exceptionnellement, nous le rassurerons : l’huile d’olive du Domaine Les Bastidettes coûte 9,60 e en bouteille de 50 cl. Notez que cette huile est en dernière année de conversion vers le bio, après des années d’une pratique qui en respectait spontanément les orientations. Elle obtiendra officiellement le label au mois de septembre.

JM