« Labels » ou « norme » en cosmétique ? Choisissez votre camp !

Apposer une certification « naturel » ou « bio » à un produit cosmétique n’est vraiment pas chose facile. La démarche est même tellement difficile à mettre en place que le législateur européen y a jusqu’à présent renoncé.

Le « naturel » comme le « bio » ayant horreur du vide, des organismes privés se sont emparés du sujet. Ainsi de nombreux labels strictement dédiés à la cosmétique ont-ils vu le jour. Pour faire court, ils s’articulent autour de deux pôles : Cosmos Organic, qui regroupe les exigences de bon nombre de ces labels, et Natrue, promu et reconnu par des marques de cosmétique bio. Malgré sa grande complexité, le sujet se présente donc aujourd’hui de manière assez simple. O joie, l’ensemble est aussi plutôt réussi sur le fond, le boulot ayant été bien fait. A ce jour, le consommateur peut en effet se référer à des cahiers des charges qui reflètent un réel consensus : oui, telle substance est bienvenue dans la formulation de la crème de jour, du déodorant ou du bain douche qu’il utilise. Non, telle autre n’est pas à la hauteur de l’idée que les professionnels engagés se font d’un produit naturel ou bio. Du fabricant au consommateur, chacun peut s’y retrouver, une liste claire de ce qui est autorisé ou pas étant établie pour chaque certification. Cette liste est assortie de pourcentages minimaux d’ingrédients, de bonnes pratiques environnementales, de dispositions concernant les animaux – ou pas, selon les labels -, etc.

Cet effort de clarté pourrait malheureusement être mis à mal aujourd’hui, un intrus s’étant entretemps imposé. Cet intrus, peu connu des consommateurs, jouit pourtant d’une bonne réputation dans les milieux industriels. Il ne s’agit pas d’un nouveau label, mais de la norme ISO*, respectable s’il en est dans son domaine. On aurait pu s’attendre, après les six ans de travail qui furent nécessaires à son élaboration, à ce que cette norme ISO appliquée à la cosmétique soit en mesure d’apporter de bonnes bases mondialement reconnues sur la définition de ce qu’est un produit cosmétique bio. Certains experts, dans nos milieux, ont cru que ce serait le cas. Ce ne l’est pas, et c’est très dommageable. Voici pourquoi, en quelques points, en commençant par quelques remarques sur la méthodologie :

– Des professionnels du bio ont été invités à travailler sur cette nouvelle norme. Lorsqu’ils ont donné leur avis, en faisant part de leur réprobation sur certains aspects du texte, ils n’ont pas été écoutés. Raison de cette apparente surdité : les décisions ont été prises à la majorité. Noble disposition sur le papier ; mais lorsque l’on sait que les plus grands industriels mondiaux de la cosmétique étaient présents autour de la table, on imagine volontiers la tournure que prenaient les discussions, et les décisions qui s’ensuivaient…

– Sur la clarté vis-à-vis du consommateur : lorsqu’une une allégation « naturel » ou « bio » apparait sur un emballage assorti de cette norme, le consommateur devrait pouvoir savoir de quoi il retourne. Eh bien allez donc faire un tour sur le site d’ISO, et essayez de vous faire un avis par vous-même : il vous faudra obligatoirement mettre la main au porte-monnaie, et pas qu’un petit peu ! 100 euros environ le PDF, rien que pour être informé !

Sur le fond à présent, voici les points problématiques qui ont le plus souvent été relevés :

– Dans sa définition d’un ingrédient « naturel », la norme ISO n’exclut pas les OGM.

– Dans la formulation d’un produit cosmétique avec reconnaissance de la norme ISO, un ingrédient bio pourra allégrement côtoyer tout ce que vous avez méthodiquement appris à fuir : des conservateurs comme les parabènes, des solvants pétrochimiques…

– Le pourcentage d’ingrédients naturels ou bio annoncé sur un produit ISO ne reflétera en rien l’exigence de la démarche globale. Imaginons qu’un produit revendique 20% d’ingrédients bio : si les 80% non bio sont issus d’OGM ou pétrochimiques, est-on en présence d’une réelle démarche bio ? En aucun cas. – Par ailleurs, ce pourcentage d’ingrédients bio revendiqué sur l’emballage ne sera contrôlé par personne, car ISO est une norme, pas un label.

Pas terrible, hein ? Reste à savoir ce qui changera, concrètement, pour le consommateur. Rassurez-vous chers lecteurs, si vous êtes clients Satoriz, strictement rien. Nous continuerons de ne proposer que les produits labellisés issus de marques que nous connaissons bien, comme par le passé. Ailleurs, dans d’autres circuits et à l’étranger plus qu’en France, ce ne sera pas pareil. Le bon côtoiera probablement fréquemment le pire. Mais le plus grave, à nos yeux, dépasse le simple cadre de la cosmétique. En « normalisant » le mot bio, on pourrait croire que la définition et la rigueur du bio se trouveraient renforcées. C’est tout le contraire qui se produit. Le mot bio est désormais banalisé ; coupé de la notion de démarche et d’engagement, il est réduit à la seule notion d’ingrédients bio dans un contexte non bio. Par extension, c’est toute la logique de la démarche bio originelle qui se trouve salie, et les mauvaises langues ne manqueront pas d’appuyer là où ça fait mal.

Il va donc falloir expliquer, ce que nous ferons volontiers, et lutter contre les influenceurs qui profiteront de ce nouveau flou habilement orchestré par l’industrie pour débiner le bio, nous nous y emploierons aussi.

La norme ISO 16128 définit ce qu’est un ingrédient naturel ou bio. Cette norme se concrétisera-t-elle par un logo sur l’emballage ? Nul ne le sait ! La seule garantie pour le consommateur d’échapper à cette vision restrictive du bio, c’est de cautionner les labels. Voici les principaux :

JM