La ferme du Crêt Joli – Comme un goût de r’vienz’y !

Jolie vue ! La Ferme du Crêt Joli est blottie sur la colline de Minzier, au cœur du Pays du Vuache en Haute-Savoie. Qui se trouve être aussi le pays des vaches, et pas des moindres : nous sommes dans le terroir des IGP Tomme de Savoie, Raclette de Savoie et Emmental. Au milieu de cette production laitière on ne peut plus intensive, la Ferme du Crêt Joli a longtemps été l’unique exploitation bio. Et symbolise, dans notre cœur, la crème des fermes !

Autonomie

Avouons-le d’entrée de jeu : Jérémie Courlet, le fromager du Crêt Joli, a travaillé pendant plusieurs années à Satoriz Annecy. Et s’il a changé de crèmerie, il n’en a pas pour autant oublié les copains ! À l’écouter narrer son expérience de maître fromager sur une exploitation agricole cohérente et quasi autonome, Sat’info boit du petit lait.

Bio depuis dix ans, la ferme du Crêt Joli a été créée en 1970 par les parents des associés actuels. Constatant que le mode d’exploitation intensif n’était viable ni pour les bêtes, ni pour la terre, et pas davantage pour les hommes qui la cultivent, cette première génération a tranquillement cheminé vers un autre modèle agricole en se réappropriant le métier de paysan. À l’heure de prendre la relève, leurs enfants certifient la ferme en bio et passent au niveau supérieur : rendre l’exploitation autonome en produisant sur place la quasi-totalité de l’alimentation des bêtes.

Jérémie, Claude, Hubert et Alexandre élèvent un troupeau d’une centaine de vaches – principalement des Montbéliardes, la race locale – et cultivent les céréales et légumineuses bio qui les nourriront. D’avril à octobre, elles pâturent dans des prairies naturelles qui donnent au lait les arômes floraux caractéristiques du terroir haut-savoyard. En hiver, elles consomment la ration produite sur place. Cette alimentation aux petits oignons leur permet de nécessiter très peu de soins médicamenteux, exclusivement dispensés au moyen de plantes ou d’homéopathie.

 

Valorisation

Pour vivre pleinement le métier de paysan, l’autonomie est une chose et la valorisation en est une autre. Valoriser, c’est mettre en valeur et faire connaître sa production. Livrer du lait sans en connaître la destinée ? Très peu pour le Crêt Joli, où l’on a choisi de transformer le lait de la ferme – celui-là et aucun autre, vous avez bien suivi ! – dans les murs de la ferme. Il se fabrique donc sur la colline de Minzier des yaourts et des fromages, vendus sur place ainsi que dans quelques magasins bio régionaux. Satoriz est le premier réseau à emmener ces produits jusqu’à Aubagne, Nîmes, Mâcon, Montpellier… Des produits fermiers, donc. C’est forcément naturel et sain, vous en conviendrez ? Pourtant, une fois de plus, il s’agit de bien lire les étiquettes… Un produit fermier est fabriqué à la ferme avec le lait de la ferme. Mais rien n’empêche le fermier d’ajouter tous ces petits trucs qu’on adore détester : arômes, poudre de lait, colorants, conservateurs… Il en a le droit. En clair, on n’a pas fini d’y aller à la loupe.

Au Crêt Joli, fort heureusement, les mots « bio » et « fermier » ne comptent pas pour du beurre. Le lait est transformé sans homogénéisation* ni poudre de perlimpinpin – vous savez, celle qui vient d’on ne sait où, mais certainement pas de la ferme… Le résultat est par nature très éloigné des standards des hypermarchés : une fine couche de crème remonte à la surface des yaourts, c’est tant mieux, cela veut dire que le lait est riche et qu’il n’a pas été dénaturé. Afin d’être raffermi, il est simplement placé quelques minutes en cuve à 85 °C, ce qui permet à une partie de l’eau de s’évaporer. Le yaourt est ensuite délicatement brassé à la main… Pas parce que c’est joli à regarder, mais bien parce que cela garantit un maximum d’onctuosité !

Pour préparer le fromage blanc, le lait est lentement acidifié 20 heures durant avant d’être égoutté. Une étape dont se dispensent les industriels, qui lui préfèrent l’ultrafiltration – une technique semblable à celle du « cracking », qui consiste à faire passer le lait au travers de plusieurs grilles superposées destinées à retenir les protéines tout en laissant s’écouler le petit-lait. Pas de ça ici, évidemment. On reviendra aussi se régaler avec le Novéry, fromage au lait cru entier, à pâte molle et à croûte fleurie. Nature, à l’ail des ours, au fenugrec ou au cumin selon la saison, il diffère par sa forme, sa couleur et son goût des spécialités savoyardes produites alentours. Comme la Raclette et le lait cru du Crêt Joli, il charrie les saveurs des prairies locales et le goût du travail bien fait. Unique et authentique.

CC