Le kéfir, entre tradition et modernité

Dans le précédent numéro de Sat’Info, nous découvrions les bienfaits de la fermentation et sa mise en oeuvre « maison », avec le kombucha. Aujourd’hui, nous allons concentrer nos forces sur un seul aliment qui nous veut du bien, et pas n’importe lequel : le kéfir de lait, pilier des aliments fermentés, en outre absolument passionnant pour qui se pique un peu de cuisine. On va donc causer fermentation lactique et… sérendipité !

Heureux hasard

viagra 001On l’évoquait dans l’épisode 1, la fermentation modifie la structure même des aliments. Elle leur permet de se conserver sans se détériorer, les rendant plus digestes, plus assimilables, plus riches en nutriments… On en déduit fort logiquement qu’un lait fermenté n’a plus le profil nutritionnel d’un lait classique. Il est plus facile à digérer, plus riche en enzymes et en probiotiques, excellent pour la flore intestinale. Un bon argument pour se régaler de « trois produits laitiers par jour », comme on nous le martèle gentiment mais fermement depuis des années ? Pas nécessairement, car là encore il nous appartient de doser savoirs et saveurs, recommandations et intuition.

Comme le thé, le café, le roquefort ou la chicorée, le kéfir est d’abord le fruit de la sérendipidité. Celle-ci n’est pas une plante mais un joli mot qui chante, pour désigner les heureux hasards et autres découvertes inattendues… Va pour la sérendipidité, donc, assortie d’une bonne louche du sens pratique des peuples nomades du Caucase (Europe de l’Est, Russie, Moyen-Orient), qui conservaient le lait de leurs animaux à température ambiante dans de gros récipients en chêne. Jamais vraiment nettoyés ni vidés, ces fûts laissaient le liquide fermenter. On dit qu’un jour, on se plut à y ajouter des caillettes de veau ou de mouton dans l’idée d’aseptiser le milieu… Ce qui se passa, un biochimiste vous l’expliquera mieux que moi. Mais l’essentiel, c’est que les grains de kéfir étaient nés – précieuses et minuscules boules blanches, gélatineuses, constituées d’un mélange de levures (dont le Kefir candida) et d’une vingtaine de bactéries.

Dans le Caucase comme dans d’autres contrées où on découvrait les laitages fermentés, le kéfir fut auréolé de pouvoirs magiques et étiqueté source de longévité. On repéra au fil du temps ses bienfaits sur les maladies gastrointestinales et l’immunité. Les Anglais ne s’y trompèrent pas : de la guerre de Crimée en 1855, ils rapportèrent des grains de kéfir. Cinquante ans plus tard, les scientifiques certifièrent qu’il participait à la longévité du peuple bulgare. C’étaient les prémices des recherches sur les fameux probiotiques, dont on connait aujourd’hui très bien le fonctionnement et dont on mesure l’action sur la flore intestinale.

Retour à notre siècle : on peut acheter du kéfir en bouteille dans les rayons de Satoriz. Plusieurs marques en proposent, à vous de choisir votre préférée. Ouvrons-en une, pour voir. Un léger pschhh nous rappelle qu’on est bien en présence d’un aliment fermenté, qui contient du gaz carbonique… Ce pétillant est très éphémère et s’estompe presque aussitôt. Pour le reste, il est aussi blanc et opaque qu’un yaourt à boire épais, avec à peine quelques bulles. On goûte ? C’est d’abord une note laitière très prononcée, proche du lait concentré ou d’un caramel blond, puis une autre note très rafraîchissante, saveur citron/citron vert. Chic, on a trouvé notre laitage de l’été !
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Ne pas confondre !

– Fermenter n’est pas cailler : on fait cailler du lait en lui ajoutant une substance acide (citron, vinaigre) et on fabrique du fromage en additionnant au lait de la présure animale. Dans ces deux cas, il ne s’agit pas de fermentation.

– Kéfir de lait et kéfir de fruits sont deux boissons distinctes. Le kéfir de fruits est fabriqué à partir d’autres bactéries contenues dans un autre type de grains, translucides. On leur ajoute de l’eau, du sucre, du jus de fruits et des fruits secs pour obtenir une boisson légèrement pétillante.


Kéfir maison

10fermentsPour se procurer du kéfir, deux solutions : l’acheter tout fait, ou le faire soimême. On trouve aujourd’hui des sachets de ferments dans notre rayon frais (merci NAT’ALI !). Pour faire son kéfir avec 1 litre de lait de vache (choisi au rayon frais également, c’est conseillé), il suffit de mélanger ce dernier aux ferments, de fermer la bouteille et de laisser le tout 24 heures à température ambiante.

Ensuite, on ne boudera pas son plaisir de « faiseur de kéfir » exigeant, en prolongeant ou non la fermentation de quelques heures pour parvenir au degré de pétillance souhaité. Et hop, frigo ! Ce kéfir maison peut être réensemencé jusqu’à dix fois (conserver un verre de kéfir comme base, 3 jours maximum). On peut l’aromatiser avec du sucre vanillé, de l’extrait de vanille, des huiles essentielles diluées dans du sirop d’agave ou de riz…

10kefirpainIngrédient de choix

Quitte à inviter le kéfir dans notre cuisine, autant avoir en tête tous les services qu’il peut nous rendre. Ceux-ci participent de deux démarches, différentes mais pas incompatibles :

1) Profiter des bienfaits du kéfir sur la flore intestinale. Auquel cas, il importe de le consommer frais, car la cuisson ne permet pas de conserver sa richesse en probiotiques (la congélation, en revanche, ne nuit pas). Cela requiert des recettes rapides et désaltérantes, et ça tombe bien : c’est l’été, dites donc ! Faites-en une base de soupe froide, de sauce salade ou de smoothie.

2) Mettre à profit le kéfir dans les préparations exigeant un peu de gonflette. Fermenté donc un peu magique, il va participer tout naturellement à la levée des pâtes à pains, à cake ou à crêpes, en apportant au passage un plus indéniable en termes de texture (beaucoup de moelleux et de saveur). Testez donc le « gâteau au yaourt » sur la base d’un grand pot de kéfir (250g), les muffins ou le célèbre pain irlandais sans levure.

Voir nos recettes au kéfir

A lire aussi : Yaourts – Kefir, desserts et boissons fermentées…, Dounia Silem, édité par NATALI (non disponible chez Satoriz).

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