Agrumes et eau de fleur d’oranger du côté de Vallauris

Les clients de Satoriz Vallauris ont décidément beaucoup de chance. Non seulement l’équipe qui les accueille est engagée et fort sympathique, mais ils profitent d’un véritable trésor qu’ils sont les seuls à pouvoir savourer : des agrumes bio fraîchement produits juste à côté d’ici. Cueillis et livrés directement, sans passage en chambre froide, ces derniers sont souvent consommés le jour-même. Une expérience gustative réservée aux locaux de l’étape et aux chanceux de passage entre décembre et février… Y a pas photo, il faut venir goûter : les agrumes de Vallauris ont « le goût d’ici », un parfum à part, un effet terroir. Le citron et l’orange douce sont plus acidulés, leur acidité marquée sans être agressive, le sucre bien présent. Une véritable expérience gustative et émotionnelle.

Ces merveilles-là sont cultivées par Jean-Noël Falcou et son associé Adrien Strutynski. Agrumiculteurs, c’est leur métier ! Jean-Noël était instituteur lorsqu’il a repris une exploitation en 2004, sans aucune formation. Ses ressources ? Les livres, et surtout les anciens ! « J’ai beaucoup lu sur la bio et les agrumes, et beaucoup rencontré les vieux », s’amuse-t-il en faisant la liste de ses essais, erreurs et autres galères des débuts. Et puis, ça a marché : trois ans plus tard, le premier verger d’agrumes bio de métropole était né. Uniquement des clémentines au départ, avant de diversifier. Aujourd’hui, c’est Adrien qui pilote la production d’une cinquantaine d’agrumes différents : clémentines, oranges amères, citrons, oranges douces, pomelos, mandarines et de nombreuses variétés d’agrumes originaires d’Asie, comme la formidable main de Bouddha… mais aussi de quelques fruits d’hiver : kaki, feijoa et grenade. Un travail très saisonnier qui nécessite de slalomer entre trois parcelles, faute de grand terrain disponible.

Car ici, tout est à flanc de colline et surtout, tout est bétonné ! Le terroir des agrumes, cette cuvette de Golfe Juan – Vallauris, située plein sud, protégée des vents et proche de l’eau, est aussi le terrain privilégié des promoteurs immobiliers… Les années de gel que furent 1985 et 1986 ont incité les propriétaires des dernières parcelles à les vendre aux bétonneurs, qui bétonnèrent. Jean-Noël et Adrien nous donnent rendez-vous chez un ami qui leur prête… son jardin ! C’est un jardin en terrasses agrippé à une maison, elle-même accrochée au coteau qui surplombe la ville de Vallauris, et tout en bas, la mer… La mer qui apparaît et disparaît au rythme des virages et des propriétés qui se jalousent le moindre centimètre carré de cette route escarpée. On gare la voiture en plein dans la pente en priant pour qu’elle n’en profite pas pour partir à reculons… et on découvre une toute petite parcelle étagée, plantée d’orangers et de citronniers luxuriants. En respirant, puis en goûtant, on se remplit du parfum enivrant d’ici.

L’eau de fleur d’oranger

Vallauris est le berceau de la production de l’orange amère, le bigaradier. Ici, ça touche tout le monde : la fleur d’oranger est la saveur locale par excellence, on en fait traditionnellement de la liqueur, des orangettes, de la confiture, de l’huile essentielle de petit grain bigarade… Jean-Noël et Adrien sont les seuls agrumiculteurs du coin à la cultiver en bio. Depuis deux ou trois ans, ils se sentent soutenus : fini le rôle de bizarre de service, cultiver en bio signifie enfin quelque chose !

Grâce au succès de leur financement participatif, ils achètent un alambic qui leur permet de distiller l’eau de fleur d’oranger. Les fleurs du bigaradier sont cueillies le matin. On fait tomber celles qui sont ouvertes – et uniquement celles-ci – sur une toile de jute. Une fois triées, elles sont immédiatement distillées. Un kilo de fleurs donne un litre d’eau de fleur d’oranger ; un taux de concentration particulièrement élevé qui permet d’obtenir une eau florale très parfumée. L’huile essentielle obtenue au cours de la distillation se nomme le néroli : elle est destinée aux meilleurs parfumeurs de la région.

Suite à un gros pépin climatique dans la production de clémentines, Jean-Noël s’est lancé il y a quelques années dans les confitures afin de mieux valoriser ses agrumes. À l’ancienne, comme à la maison, il transforme les fruits sur trois jours, en faisant d’abord tremper les écorces pour ôter leur amertume. À la cuillère, c’est aussi gourmand que délicat. Un peu comme nos deux agrumiculteurs, épuisés en cette fin février, mais positivement heureux au soleil, en lien avec le terroir et les gens d’ici !

CC